La qualité du sonore en vogue dans le monde
La qualité du sonore a le vent en poupe et, actuellement, c’est une préoccupation mondiale majeure. De ce fait, le Festival de Cannes 2018 décernera, à nouveau, un prix à la meilleure création sonore cinématographique.
Désormais l’importance de la qualité du sonore est soutenue, depuis la fin 2017, par la Résolution 39C/49 adoptée par l’UNESCO. Cette résolution est l’accomplissement d’une initiative conjointe de l’Argentine, Belgique, France, Japon et Liban. Ces cinq pays, par le biais de La Semaine du Son, ont fait une demande à l’UNESCO afin de sauvegarder l’audition. Ce sens du corps responsable de l’équilibre et qui permet la perception des sons. Mais qui est aussi un récepteur sensuel : – Qui n’a pas la chair de poule quand l’on lui susurre des mots doux à l’oreille ?
Cette résolution de l’UNESCO met en relief les mesures à adopter. Non seulement pour améliorer l’écoute, mais aussi pour préserver notre santé auditive, et promouvoir de bonnes pratiques. La surdité est un problème grave, d’où l’engagement de l’organisation onusienne pour l’éducation, la santé et la culture.
Plus d’un milliard de mal entendants dans le monde
Ce souci, pour une meilleure maîtrise de la qualité du sonore et préserver l’ouïe, a été appuyé par l’OMS – Organisation Mondiale de la Santé. Or la planète Terre compte, aujourd’hui, 1 milliard 300 millions de mal entendants.
Voilà pourquoi ces deux organisations ont adopté les 5 points principaux de la Charte de la Semaine du Son.
Car La Semaine du Son lance l’alerte depuis des années. Pas seulement sur la santé, l’environnement acoustique et urbain, les techniques d’enregistrement et de diffusion. Mais aussi sur la relation entre l’image et le son, l’expression musicale et le son en général.
En effet les personnes deviennent de plus en plus sourdes suite à l’arrivée du téléphone portable. Mais aussi à cause de l’écoute trop forte avec des casques, et d’être restées trop près des haut-parleurs dans un concert.
L’enregistrement compressé nuit à la qualité du sonore
Une autre cause de la surdité est l’enregistrement compressé. Comme le MP3, qui enlève les silences. Ces silences qui sont très importants pour laisser l’oreille reposer, et pour la qualité du sonore.
Jean-Michel Jarre, compositeur de musique électronique, et parrain de cette Semaine du Son 2018, rappelle que les Chinois disent que « les silences donnent des valeurs aux notes, pour mieux les apprécier ».
« La compression de la musique est de plus en plus hystérique, explique Christian Hugonnet, président fondateur de la Semaine du Son. D‘où l’importance de reconstituer le son correctement. Le nombre d’illettrés du son va en s’empirant. Il ne s’agit pas d’interdire la compression, il s’agit d’améliorer la qualité de l’écoute. Trop fort n’est pas égal à qualité. Bien au contraire. Il faut créer des paupières pour l’ouïe. »
Quelques maladies auditives dues à la mauvaise qualité du sonore
Aussi une mauvaise qualité d’écoute cause des acouphènes, des bruits parasites, comme un bourdonnement, un sifflement, ou des cliquetis, qui embêtent beaucoup sans causer pour autant une lésion du tympan. Ou l’hyperacousie, une lésion des nerfs auditifs due à un dysfonctionnement et qui provoque une hyper fragilité de l’ouïe. Ou encore la presbyacousie, le vieillissement auditif des gens exposées aux bruits et aux sons.
En clair, l’exposition de plus de 4h, tous les jours, au son d’un martèlement sonore, ou musical, saturé, ou sur-amplifié, cause des déficiences auditives. Et à long terme la perte de l’acuité auditive. Donc : protégeons-nous !
Baissez le son, SVP
Le sonorisateur David ROUSSEAU cite les « dangereuses rave parties où le son est de plus en plus fort. Avec un volume 40 fois plus fort » que la norme recommandée. Ou encore certains concerts dont « les niveaux sonores peuvent dépasser plus de 140dB, pour plus de 15m devant la scène d’un festival ».
Avis donc à tous ceux qui restent longtemps exposés aux sons forts. Tels les musiciens, les travailleurs d’ateliers de fabrication, de rénovation des bâtiments, des aéroports, des routes, des bars et des restaurants.
« Huit Français sur dix sont gênés par le bruit », annonce le reportage d’Agnès Monteux : « Des Villes en sourdine » au 20H sur France 2, le 2/2/18.
La qualité du sonore est essentielle pour un environnement harmonieux. Afin que l’être humain puisse vivre paisiblement et en santé. Tant au niveau individuel que collectif. Car plusieurs secteurs sont concernés, du médical au culturel, en passant par l’environnemental, mais aussi l’économique, le sociétal et l’industriel.
Par conséquent une prise de conscience du grand public est nécessaire, commençant dès le plus jeune âge. Mais pour cela il faut une implication politique des États, pour préserver les populations. Parce que « des sons, même les moins parlants, présents au quotidien, agissent de manière nocive sur la santé », dit Christian Hugonnet.
Des sens à préserver précieusement
Cette préoccupation est partagée par Didier Lockwood. Il évoque les méfaits de la compression de nos sens, et du smartphone. En effet, tous nos sens sont complexes et surtout à préserver précieusement, puisqu’ils font partie de notre patrimoine familiale. Tout est liée et notre santé dépend du soin qui nous portons à nos sens. Ainsi les vibrations sonores, transmises par l’air, arrivant au tympan, stimulent le nerf auditif qui produit une sensation sonore, dans le cerveau. Tout comme l’image projetée au fond de l’œil est interprétée par le cerveau sensitif, nous donnant la perception de l’image.
Rythme et son les bons amis
Dans son intervention, forte de sens, Didier Lockwood rappelle qu’« Au départ on a toujours l’impression que le son est une période, qui se situe sur une longue période ou une courte période. Mais en fait le son c’est [aussi] du rythme ». Pour ce violoniste de Jazz le son et le rythme vont de pair. Et, pourtant, « on oppose souvent le son au rythme. Et, d’ailleurs, dans l’enseignement de la musique c’est ce que l’on a tendance à faire ».
MaLiSa, une bonne application pour la qualité du sonore
La doctoresse Shelly CHADHA, responsable du programme de prévention de la surdité et de déficience auditive de l’OMS. Elle est préoccupée par l’importance de la qualité du son et d’une écoute en sécurité. Alors elle a mis en place l’application MaLiSa.
Cette application sera diffusée au ministère de l’Éducation nationale, « pour protéger les oreilles afin de ne faire entendre que des sons agréables ».
Il est vrai que le monde est de plus en plus bruyant. Partout la densification des populations et l’intensification de l’urbanisation, engendrant travaux et vibrations, entraînent une augmentation du niveau du bruit dans les villes.
Alors pour mieux éclairer sur l’enjeu du sonore, la 15è Semaine du Son présente partout en France une pléthore d’événements. Des rencontres, débats avec des spécialistes, conférences, expositions, concerts.
La Semaine du son débutée cette année le 20 janvier n’est pas encore finie. Ce dimanche 4 février 2018 au Musée de l’Homme, à Paris, une conférence évoquera « Le pouvoir évocateur du son et ses manipulations dans le travail radiophonique ».
La Manipulation Sonore
Cette façon de contrôler le son rappelle à la rédaction de regardinfos.com l’excellent livre de Juliette Volcler. Titré « Contrôle, comment s’inventa l’Art de la Manipulation Sonore ».
Ce livre, très bien documenté, de Juliette Volcler, révèle l’inventivité d’un ingénieur américain méconnu. Il s’appelle Harold Burris-Meyer.
Juliette Volcler éclaire dans une ITW à Télérama, que Burris-Meyer « utilise le théâtre comme un laboratoire. Il met au point des techniques d’acoustique inédites pour surprendre le public… Comme une division de blindés roulant avec fracas au-dessus des têtes du public. Ou un avion qui tourne dans la salle pour aller s’écraser dans l’orchestre, évoqué par le Sunday Morning Star de Wilmington en 1941».
Harold Burris-Meyer est la référence en matière de manipulation du son. Son génie allait des utilisations dignes mais aussi contre la liberté, au profit des puissants.
Des leurres sonores
Burris-Meyer a su manipuler le son du théâtre à l’armée. Comme ça a été le cas durant la Seconde Guerre mondiale. Quand il a utilisé des leurres sonores pour effrayer l’ennemi.
Or par ses expériences, Burris-Meyer constate que le son est un pouvoir. C’est une arme acoustique, qui peut donner du plaisir ou nuire. Allant des dessins animés des studios Walt Disney, où il a travaillé, en passant par l’industrie où il a fait quelques essais. Résultat : il a réussi à augmenter la productivité de 6 à 11% sur certains créneaux horaires.
Tout cela prouve que le son a une influence sur les émotions et les comportements individuels. Mais aussi collectifs, exerçant un contrôle presque imperceptible sur ceux qui l’entendent. Le compositeur Greco Casadesus souligne que dans un film « la musique peut changer le sens d’une image ou d’une séquence ». Il cite en exemple la musique lente des films de Akira Kurosawa, alors que l’image est d’une extrême violence. En parlant d’un réalisateur, Greco Casadesus évoque un autre, Costa Gravas, qui fait le casting de ses comédiens par rapport à la texture de voix de ses personnages.
Jean Musy et ses Causeries Musicales
Enfin la Semaine du Son relance son concours video. Cette année la musique, inédite, qui doit inspirer les cinéastes, est de Jean Musy, Ce charmant compositeur, 70 ans, avoue au Centre National du Cinéma – CNC, qu’il a hâte de « voir ce que les gens imagineront mettre en scène, pour créer des images sur [sa] musique ». Avant d’annoncer qu’il donne un concert, le 13 février : Les Causeries Musicales, à l’Institut National des Jeunes Aveugles, à Paris.
La création sonore valorisée au Festival de Cannes
Un autre point fort de la Semaine du Son sera sa présence au Festival de Cannes 2018. Grâce à son délégué général, Thierry Frémaux, le Festival attribuera, pour la deuxième fois, le Trophée de la Meilleure Création Sonore à un film.
Et n’oubliez pas qu’une bonne communication dépend de la bonne qualité du son. Mais méfiez-vous des manipulations sonores.
Neide Olívia de Souza.