Le Silence de Sibel d’Aly Yeganeh en salles ce mercredi
Un film visuellement très beau, touchant et poignant, sur une jeune yésidie violée par Daech. Sibel vit en France avec Hana, celle qui a réussi à l’arracher à l’enfer.
LE SILENCE DE SIBEL raconte le vie d’une fillette. Or, après avoir assisté au massacre de ses parents, Sibel est victime d’esclavage sexuel par des tortionnaires barbares de l’EI (État islamique) « Daech ».
Alors, suite à une rançon de quelques milliers d’euros, Hana, une ophtalmologiste franco-iranienne qui vit en France, dans l’Uzerche, récupère et adopte Sibel. Afin qu’elle puisse vivre dans un lieu paisible tout près d’une rivière.
Hana la ramène donc dans le Limousin où elle s’efforce de lui offrir une vie plus « normale », d’amour et d’attention. Sauf que, malgré avoir accepté cette nouvelle existence, l’enfant reste silencieuse. Puisqu’elle ne supporte pas de vivre dans ce corps torturé et violé. Car le calvaire vécu est très difficile à s’effacer de sa mémoire.
Une tragédie sur des faits d’actualité
Ce film se base sur des faits réels. Car ça se passe en août 2014 à Sinjar, ville du Kurdistan irakien, où vivent les Yézidis(1). En fait les Yézidis, ou Kurdes d’origine, font partie d’une minorité kurdophone. Dont la religion est un monothéisme qui puise ses croyances dans le zoroastrisme(2) des anciens perses. Du coup ils sont considérés comme des hérétiques par ces musulmans radicaux fanatiques de l’EI, qui désirent éradiquer les non-islamiques. « Ce massacre est reconnu par l’ONU comme un génocide », explique Aly Yeganeh.
Une vie brisée
Ainsi ce documentariste attaché aux questions questions sociales et psychologiques met en scène le regard pur, naïf, indicible de Sibel. Alors que cette jeune adolescente s’interroge sur la mort qui l’a effleurée, et ces tueurs qui l’ont déflorée pour toujours. Le réalisateur montre ainsi « le fascisme aux yeux de cette gamine » à l’enfance volée. Et ces faits ne sont donc pas isolés car des milliers d’autres enfants subissent le même sort.
Interviewé par Regardinfos, au Festival de Cannes 2023, Aly Yeganeh avance le chiffre de « 7.700 jeunes filles enlevées par Daech. Et 2700 portées disparues ».
Le Silence de Sibel
En fait cette fiction montre le côté psychologique de la gamine. Mais aussi la position des adultes de l’administration face au viol des mineurs et ses conséquences.
En somme Le Silence de Sibel est un film sensible et délicat. Car, grâce au talent du réalisateur, il « évite des images d’horreur » pour dire d’une manière supportable ces faits inacceptables. Ainsi il les sublime avec la belle plasticité des images et une bande-son remarquable. Dont la musique originale est de Jean-Michel Bellaiche, interprétée par l’Orchestre national d’Ile-de-France.
Aussi ce film est porté par la belle actrice Laëtitia Eïdo (Hana), et l’étonnante Mélissa Boros (Sibel).
Or Aly Yeganeh est un iranien passionné de l’image. Voilà pourquoi Le Silence de Sibel a reçu une multitude de prix. « Plus de 20 Prix à l’international », précise l’attaché de presse François Vila. Dont 15 aussi bien aux États Unis qu’au Canada. Et ce dans les catégories : Meilleur film, Meilleure image, Meilleure actrice, Meilleure production indépendante, …
Selon cet auteur-réalisateur écologiste son film « n’est qu’une tentative pour attirer les regards vers un problème universel, qui est la guerre. Où les femmes et les enfants paient le prix le plus élevé ! »
Voilà des raisons qui font que Le Silence de Sibel est un film fort et à voir absolument !
Neide Olívia De Souza.
Notes :
(1) Les Yézidis sont endogames. Or ce peuple, qui se marie dans sa propre tribu, ne croit pas à une force maléfique (diable, Satan) opposée à Dieu. Ainsi leur seul Dieu représente, en même temps, le principe du Bien et du Mal. Les Yézidis croient aux sept anges. Dont le chef est représenté par l’ange Paon (Tawûsî Melek).
(2) Zoroastrisme : cette religion basée sur la philosophie de Zarathoustra combat l’oppression, défend l’égalité entre hommes-femmes, cultive la joie de vivre, respecte toutes les formes de vie, rejette l’idolâtrie. Son dieu unique est Ahura Mazda, « le seigneur sage ».